dimanche 25 mai 2008

Lettre ouverte au procureur de la Cour pénale internationale

mercredi 21 mai 2008, 10:26


J’espère sincèrement que les horreurs dont l’humanité a souffert au cours du vingtième siècle nous serviront de leçon douloureuse. »

Monsieur le procureur de la Cour pénale internationale, c’est par ces mots qu’à l’occasion de votre élection, vous souligniez avec émotion votre volonté d’éviter que les atrocités commises au cours du siècle dernier ne soient répétées.

A l’aune de la récente Journée de la femme, le Parlement de la Communauté française a consacré ses travaux aux violences faites aux femmes en République démocratique du Congo.

Pas une semaine ne passe sans que les médias, les ONG, diverses personnalités civiles, politiques ou judiciaires ne nous relatent des cas terribles de viols dans l’est du Congo à l’égard d’un grand nombre de femmes de tout âge et aussi, de plus en plus, à l’égard d’hommes. De 2004 à 2007, on observe de 26.000 à 64.200 cas recensés de viols.

Au-delà de ces statistiques, c’est le caractère systématique et le modus operandi de ces odieuses pratiques qui nous interpellent en tant que femmes ou hommes engagés face à l’horreur. Et cela d’autant plus que nous ne pouvons nier qu’il s’agit d’une stratégie qui ne dit pas son nom visant à détruire les victimes directes de ces viols, et aussi leurs familles, souvent contraintes à être les spectatrices impuissantes de ces atrocités.

Au travers de ces familles brisées, ce sont des communautés locales entières et finalement l’ensemble de la société congolaise que ces actes innommables visent à déstructurer et à annihiler.

Remarquons par ailleurs que ces crimes sont dans la plupart des cas le fait de soldatesques présentes dans la région, pour la plupart, depuis presque quinze ans. Ce qui pose en tout état de cause la question de la responsabilité de la communauté internationale.

Après toutes les initiatives de sensibilisation, de témoignages et de manifestations, ce qui doit nous interpeller et nous préoccuper aujourd’hui, ce sont la dénonciation de ces crimes odieux et les sanctions qui doivent s’ensuivre, à la mesure de l’horreur commise. Quand on sait, qu’au Sud-Kivu, seuls 444 cas ont été déférés à la justice civile et militaire avec des traitements inégaux, faute de moyens humains et financiers pour la récolte de preuves et pour l’aide aux victimes notamment…

Au-delà du traitement judiciaire, les conséquences sociétales des violences sexuelles sont incalculables : physiques et sanitaires (fistules traumatiques, maladies sexuellement transmissibles) ; sociales (rejet, rupture conjugale, abandon d’enfant, exode rural) ; économiques (pillages, déperdition scolaire, appauvrissement) ; psychologiques (traumatismes, destruction de la culture, déliquescence des repères sociétaux, complexe de persécution).

A ce jour, les pouvoirs législatifs et exécutifs, belges notamment, ne sont pas restés inactifs. Interpellés par nombre d’ONG et par la société civile dans son ensemble, des initiatives encore insuffisantes voient le jour depuis cinq ans : adoption de résolutions parlementaires, tous niveaux de pouvoirs confondus ; missions parlementaires et ministérielles, encore très récemment.

Outre les aspects sociaux et sanitaires, pour lesquels les initiatives des pouvoirs législatifs et exécutifs congolais, belges et internationaux se multiplient, il est urgent maintenant que la Justice fasse son travail.

Si le Congo a réformé son code pénal et sa Constitution pour prendre en compte ces phénomènes de violences sexuelles, le chemin est encore long pour rendre totalement opérationnelles ces modifications. La Justice internationale doit agir maintenant sans délai.

L’article 3 des Conventions de Genève s’applique aux conflits armés internationaux ou non internationaux et prohibe les atteintes portées tant à la vie et qu’à l’intégrité corporelle.

Le Protocole additionnel aux Conventions de Genève relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux – auquel la RDC a adhéré le 12 décembre 2002 – prohibe, quant à lui, les atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et dégradants, le viol, la contrainte à la prostitution et tout attentat à la pudeur ainsi que l’esclavage et la traite des esclaves sous toutes leurs formes.

Le Statut de la Cour pénale internationale – ratifié par la RDC – classe notamment les infractions suivantes dans la liste des crimes contre l’humanité : viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, stérilisation forcée, et persécution de toute collectivité identifiable pour des motifs liés au genre lorsqu’elle est en corrélation avec un crime relevant de la compétence de la Cour.

Il y a donc pléthore de possibilités pour que ces crimes qui minent l’est du Congo soient examinés urgemment par les juridictions internationales.

Au-delà de toutes les actions évoquées, pour les victimes, pour nos sœurs et nos frères congolais, pour l’humanité tout entière, à ce que l’espérance que la justice soit rendue ne demeure pas une utopie et, selon le souci que vous exprimiez et que nous partageons, nous en appelons, Monsieur le Procureur, à votre diligence et votre proactivité en la matière.


Véronique Jamoulle (PS), Céline Fremault (cdH), Florine Pary-Mille (MR) et Paul Galand (Ecolo) Députés de la Communauté française de Belgique,
Elise Muhimuzi Secrétaire permanente du Comité national Femme et Développement,
Annie Balayi Kapajika Avocate au Barreau de Kinshasa,
Solange Lusiku Membre du Caucus des Femmes du Sud-Kivu pour la Paix.


http://www.lesoir.be/forum/cartes_blanches/carte-blanche-lettre-ouverte-2008-05-21-599763.shtml

"L'espoir" des victimes après l'arrestation de Bemba

Les victimes des violences en République centrafricaine (RCA) reprennent "espoir" après l'arrestation samedi en région bruxelloise du Congolais Jean-Pierre Bemba par la Cour pénale internationale (CPI), a salué dimanche la Ligue centrafricaine des droits de l'homme (LCDH).


L'ex-vice-président de la République démocratique du Congo (RDC), suspecté d'avoir commis des crimes sexuels au Centrafrique en 2002 et 2003, a été arrêté samedi dans la banlieue de Bruxelles.

"Je pense d'abord aux victimes, qui commencent à prendre espoir. Nous pensons que ce ne sera pas la dernière prise" dans cette affaire, a indiqué Me Nganatouwa Goungaye Wanfiyo, président de la Ligue centrafricaine des droits de l'Homme (LCDH), joint par l'AFP en France par téléphone.

"Le procureur l'a dit, d'autres arrestations vont suivre, c'est là le vrai début", s'est-il réjouit.

L'interpellation de Bemba est la première arrestation dans le cadre de l'enquête du procureur de la CPI, Luis Moreno-Ocampo, sur les violences sexuelles commises en RCA lors de la répression armée de l'insurrection menée par l'ancien général François Bozizé.
Menacé, le président de l'époque, Ange-Félix Patassé, avait fait appel à Jean-Pierre Bemba et à son Mouvement de Libération du Congo (MLC), stationné de l'autre côté du fleuve Bangui en RDC, pour repousser l'attaque de Bozizé entre octobre 2002 et mars 2003.

Les auteurs de ces violences ont "détruit en profondeur les structures de la société", a encore estimé Me Goungaye Wanfiyo.

Aujourd'hui, "les femmes sont rejetées par leur familles et villages, elles rejettent elles-mêmes leur enfant né d'un viol", a-t-il expliqué, ajoutant avoir "réuni des preuves" contre M. Bemba.(afp/7sur7)
25/05/08 10h28

11 ans de l’Afdl : un anniversaire douloureux pour la femme congolaise
Le Révélateur | La une|vendredi 16 mai 2008


Le 17 mai 2008, la communauté nationale va célébrer le onzième anniversaire de l’avènement de l’Alliance des Forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL). Pour les Kabilistes et alliés, ce sera une fois de plus l’occasion de se replonger, à travers une parade militaire sur le boulevard triomphal, dans le souvenir de la longue marche de sept mois, d’Est à l’Ouest du pays, qui a abouti à la chute du Maréchal Mobutu, déjà affaibli par les vigoureux tirs de barrage de l’opposition intérieure menée par Etienne Tshisekedi, le leader charismatique de l’UDPS.

A sa création en octobre 1996, l’AFDL était une rébellion menée par les Banyamulenge (Tutsi congolais) pour revendiquer le droit d’appartenance à la nation congolaise. Très vite, elle fut placée sous la responsabilité de Laurent Désiré Kabila, un fils du pays - question de lui conférer un caractère national - et prit la coloration d’un mouvement de libération du peuple congolais du joug de la dictature mobutienne. Arrivée à Kinshasa, le langage change. Au lieu de la libération, on parle plutôt de la révolution parce qu’il fallait faire table rase du passé. La Révolution Pardon prônée par Laurent Désiré Kabila a ouvert la voie à une série de violation des droits humains et des libertés : suppression des partis politiques, nationalisation des medias, etc.

Ceux qui avaient applaudi les petits hommes verts de l’AFDL, arrosant leur passage dans les rues de Kinshasa ou des provinces de l’Est du pays de bouteilles d’eau, sont aujourd’hui désillusionnés en voyant les ‘‘libérateurs’’ se transformer en bourreaux impénitents. Sur la liste des désabusés, la femme congolaise figure en bonne place. Sous le règne du Maréchal Mobutu, on lui reprochait de beaucoup danser pour déifier un homme. Aujourd’hui, elle a tout perdu de ses élans jubilatoires pour ne ressembler vraiment à rien.

Les violences sexuelles ont la peau dure

Victime de violences sexuelles considérées comme viol, elle paie encore à ce jour un lourd tribut aux conflits armés qui émaillent les années du pouvoir AFDL et de ses héritiers politiques. Les statistiques publiées par l’UNFPA sont éloquents : 17.926 cas de violences sexuelles en 2004, 16.323 cas en 2005, 13.404 cas en 2006 et 13.247 cas en 2007, soit une moyenne de 1.100 femmes violées chaque mois. Evidemment, les provinces de l’Est du pays battent le record des cas de violences sexuelles.

Les humanitaires parlent d’un phénomène déplorable qui fait du corps de la femme un véritable champ de bataille. En temps de conflit, les violences sexuelles ont été utilisées comme armes de guerre, sinon comment expliquer que dans des villages entiers à l’Est du pays, on dénombre après le passage des troupes ennemies des cas de viol parmi des enfants de 2 ans ou de vielles dames de 80 ans. Malheureusement en temps de paix également, les violences sexuelles continuent à se commettre de façon systématique et en toute impunité.

C’est ici que se situe le drame de cette situation qui semble ne pas dire grand-chose aux autorités du pays. Car les auteurs de viol sont connus, ils se recrutent aussi bien parmi les hommes armés, que des civils ou de personnes occupant des positions d’autorité et qui considèrent les violences sexuelles comme acte anodin et banal. On se demande alors pourquoi tant d’impunité ? Comment expliquer que ceux qui sont arrêtés dans ce cas arrivent à s’évader des prisons alors que les violences sexuelles sont classées parmi les crimes contre l’humanité.


Lorsque les casques bleus s’en mêlent…

Le sort de la femme et de la jeune fille congolaise suscite de graves inquiétudes, surtout après les allégations d’exploitation et d’abus sexuels impliquant des Casques bleus au Nord-Kivu. On parle d’un réseau de prostitution enfantine présumé à Masisi, localité située à environ 60 km au nord-ouest de Goma, la capitale du Nord-Kivu.

Selon l’AFP, des Casques bleus du contingent indien de la Monuc basés à Masisi auraient, pendant des mois entre mi-2007 et début 2008, eu des rapports sexuels avec des Congolaises mineures contre des sommes dérisoires, selon ces mêmes sources. Ces faits se seraient essentiellement déroulés dans un local situé non loin du camp de la Monuc, où plusieurs jeunes filles se rendaient à la demande des soldats de la paix.

Le Bureau des services de contrôle interne de l’ONU a commencé à enquêter en mars sur ces allégations, mais la majorité des Casques bleus concernés aurait quitté la Monuc dans le cadre de la rotation habituelle des troupes. Et l’accord de siège signé entre la Monuc et le gouvernement congolais est muet sur des cas qui pourraient nécessiter des poursuites judiciaires dans leurs pays d’origine contre des onusiens qui ont commis des abus en RDC.

La Monuc, qui se dit très préoccupée par ces allégations, a été éclaboussée par plusieurs scandales impliquant ses personnels, civils et militaires, dans des affaires d’abus sexuels ou de trafics de minerais, depuis son déploiement en RDC en 2001.

Le Révélateur

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